LA MONTAGNE, À LA RECHERCHE DE SON ARCHITECTURE En moins d'un demi-siècle, les activités
de loisirs liées à la montagne, à peine inventées, ont connu un prodigieux
développement. Les migrations saisonnières des touristes sont venues s'ajouter
en alternance aux "remues" traditionnelles des troupeaux. Des
ensembles urbains de plusieurs milliers ou dizaines de milliers d'habitants
sont apparus à des altitudes réputées inhabitables en hiver. La croissance
des stations de montagne a été si rapide qu'il n'a pas toujours été possible
d'en avoir une vue d'ensemble. Au-delà des controverses concernant
la décision de réaliser très vite une part importante de la capacité d'accueil
touristique en montagne, on pourrait imaginer que la réalisation d'un
tel volume de constructions et d'équipements dans une région à forte identité
paysagère, ouvrait à la recherche un champ considérable. Dans l'urgence,
le débat s'est souvent arrêté à des prises de position purement formelles:
toits pointus ou toits plats ? Allant plus loin que la simple énumération
des "générations" de stations, il faudrait avec le recul dont
nous disposons aujour d'hui apprécier les résultats du point de vue de
l'évolution des procédures d'urbanisme, de la création architecturale
et de la qualité de la vie. Jusqu'alors les constructions paysannes
s'inspiraient en chaque lieu d'un modèle d'habitation strictement
adapté à une cellule familiale et économique bien définie, et se
transformaient lentement au rythme de son évolution. Ce modèle tenait
compte de l'altitude, du climat, de la pente, des matériaux disponibles
localement et du savoir-faire des habitants. II s'adaptait aux servitudes
mutuelles que s'imposaient des familles résolues à construire solidairement
leur village. Brusquement, il faut résoudre le problème
tout nouveau d'une grande masse de visiteurs à accueillir confortablement
dans des conditions climatiques inhabituelles en leur garantissant plaisir
, sécurité et liberté de mouvement, en s'inscrivant dans des systèmes
marchands particuliers, une culture, des matériaux et des techniques de
construction en cours d'expérimentation et dans des délais accrobatiques.
II est illusoire de penser qu'on s'en tirera simplement en copiant les
formes du passé. Quelques architectes ont pris le temps
d'effectuer un travail de recherche fondé sur la réalité du terrain plutôt
que sur des théories . Tous n'ont pas pressenti que les solutions apportées
en ce domaine étaient susceptibles d'être remises en question rapidement
en raison du manque d'expérience et des caprices de la mode.